Charles Le Borgne

Le deuxième centenaire de la Maison Charles Le Borgne

 

Le  deuxième centenaire de la Maison Charles Le Borgne

 

 

 

      La maison LE BORGNE, qui a célébré les 28 et 29 Août 1935 son deux-centième anniversaire par les Fêtes que nous allons raconter, est probablement la plus vieille Maison d’Armement de France. Elle est fière se s’ être transmise sans interruption de père en fils de 1735 jusqu’à nos jours, vivant de ses seules ressources et sans l’aide des capitaux de l’Etat.

 

     Au cours des périodes troublées de l’Histoire, ses vaisseaux furent amenés à combattre, notamment, au XVIIIe siècle, sous le Premier Empire, et pendant la Guerre de 1914-1918 : en toutes circonstances, les équipages de la Maison Le Borgne et leurs capitaines, normands pour la plupart, se sont montrés les dignes fils de leurs ancêtres par leur audace intelligente et leur mépris du danger. Pendant la Grande Guerre surtout, où cinq navires de la Maison furent coulés par l’ennemi, la belle conduite des équipages du Saint-Antoine-de-Padoue, du Radium et du Charles-Le-Borgne, dans leurs combats contre les sous-marins allemands, restera justement célèbre.

 

     Dans la longue généalogie d’armateurs de la Maison Le Borgne, plusieurs méritent d’être signalés qui, par le bonheur de leurs initiatives et leur clairvoyante activité, surent lui donner un essor considérable : parmi eux, il faut citer Charles Le Borgne l’Aîné, qui resta à la tête de la Maison de 1786 à 1825. Il n’avait pas trente ans qu’il avait épuisé la série des charges électives, administratives et consulaires. On le voit tout à la fois vaquer à ses propres affaires, qui étaient multiples sur terre et sur mer, et porter les doléances de la ville de Fécamp à la Convention Nationale.

 

     Son nom se trouve à chaque page des délibérations du Conseil Municipal : il était de ces hommes à vues larges et généreuses qui ne se comptent pas de marcher dans les sentiers battus, mais vont toujours à l’avant-garde du Progrès.

 

     Après sa mort, ses concitoyens tinrent à prouver leur reconnaissance des services qu’il avait rendus en donnant son nom à une des principales artères de la Ville.

 

     Il laissa une fortune importante, dont une partie passe pour avoir été enterrée au moment de la Révolution dans les catacombes de l’Abbaye de Fécamp, et l’histoire des millions ensevelis de Charles Le Borgne, qu’on raconte encore aux petits Fécampois, fait rêver leur imagination.

 

     Monsieur Augustin le Borgne qui succéda à son père, dirigea la maison de 1825 à 1848.

 

     Il arma un certain nombre de navires pour le long cours, notamment l’industrie, dont une peinture est accrochée encore aujourd’hui en ex-voto à la Chapelle de Notre-Dame du Salut à Fécamp. Il envoya également quatre navires faire la pêche à Terre-Neuve.

 

     Il fut Conseiller Municipal, Juge au Tribunal de Commerce, Consul de Portugal, d’Autriche, des Pays-Bas et membre de diverses Sociétés.

 

     Son fils, Augustin-Charles Le Borgne, prit la tête de la Maison en 1848 et en conserva la direction pendant cinquante-quatre ans. Il était bien le digne petit-fils de Charles Le Borgne l’Aîné par la multiplicité de ses conceptions, sa largeur de vues et son besoin dévorant de toujours produire.

 

     Le travail était une nécessité de son tempérament et c’est à l’époque où la généralité des hommes éprouve le besoin de se reposer qu’il chercha de nouveaux aliments à son inlassable activité. C’est, en effet, en 1881, à l’âge de cinquante-six ans, qu’il entra dans la vie publique avec le mandat de Conseiller Municipal de Fécamp ; l’année suivante, il était nommé Adjoint puis, le 4 mai 1884, il fut élu Maire de Fécamp par 25 voix sur 26 votants. Par quatre fois dans la suite, le Conseil Municipal lui renouvela à l’unanimité son mandat. Quel plus bel éloge pourrait-on faire de cet homme, si les nombreuses manifestations des grands progrès de toutes sortes, accomplis sous son administration, n’étaient là, comme autant de témoins, pour justifier la confiance dont ses collègues l’ont honoré !

 

     Lorsque, le 13 mars 1892, M. Viette, Ministre des Travaux Publics, attacha sur la poitrine de M. Augustin-Charles Le Borgne, l’insigne de la Légion d’Honneur, il récompensa tout à la fois le travail et le dévouement à la chose publique.

 

     Le 28 août 1898 fut célébré, en une fête brillante, en sa propriété du Baillage d’Ecrainville, le cinquantenaire commercial de M. Augustin-Charles Le Borgne. Cette touchante manifestation est restée dans le souvenir de tous ceux qui y participèrent et montra hautement l’estime et l’attachement qu’avait su mériter le héros de la fête durant sa longue carrière commerciale.

 

     M. Augustin-Charles Le Borgne qui avait dirigé ses affaires seul de 1848 à 1891, puis en association avec des deux fils, MM. Charles et Augustin Le Borgne sous la raison sociale « A. Le Borgne et ses fils », se retira des affaires en 1902, laissant la direction de la Maison à ses deux fils, sous la raison sociale « Le Borgne Frères ».

 

     C’est pendant la période de 1902 à 1908 que MM. Le Borgne Frères collaborèrent puissamment à la prospérité du port de Fécamp par la fondation d’une sècherie de morues d’un genre entièrement nouveau, qui permit aux navires de Terre-Neuve et d’Islande de revenir directement faire sécher leurs cargaisons à Fécamp au lieu de se diriger, comme autrefois, sur Bordeaux et dans le Midi de la France.

 

     Ce fut la Maison Le Borgne qui arma le premier chalutier à vapeur de Fécamp pour Terre-Neuve et l’Islande et prit l’initiative de la pêche du hareng à la senne tournante et des guindeaux à moteur.

 

     En 1908, M. Augustin Le Borgne, d’accord avec son frère M. Charles Le Borgne, décida de se retirer de l’association Le Borgne frères et de prendre, pour son compte personnel, la partie de la Maison concernant les travaux publics.

 

     M. Charles Le Borgne, depuis ce moment, assume, seul, la direction de l’entreprise. Digne successeur de ceux qui l’ont précédé, il porte haut et ferme le drapeau de sa Maison ; il conserve jalousement à celle-ci sa précieuse réputation d’honnêteté et de loyauté commerciale, et, par son esprit d’initiative, sa hardiesse et sa ténacité dans la poursuite des buts qu’il s’est fixés, et il a su donner à son entreprise un développement considérable.

 

     Elle s’était déjà classée en 1919 au premier rang des maisons d’importation de charbons en France. Son tonnage s’éleva jusqu’à un million de tonnes par an et ses usines d’agglomérés de Saint-Malo, Saint-Servan, Nantes et Rouen fabriquaient à l’époque, annuellement, 300.000 tonnes de briquettes et de boulets.

 

     En 1919, M. Charles Le Borgne, dont la santé était ébranlée par un surmenage de quatre années, dut, sur l’avis formel de ses médecins, abandonner cette magnifique entreprise de charbons en plein épanouissement, demeurant seulement armateur. Mais il n’est pas de ceux qui savent prendre du repos. Dès que sa santé fut rétablie il tourna ses vues du côté de la Méditerranée. En 1924, il se rendait acquéreur à Port-Saint-Louis-du-Rhône de vastes entrepôts et terrains et y créait une succursale importante.

 

     Il organisait la même année d’autres succursales à Alger et à Oran, pour exploiter sa première ligne régulière de transports maritime en Méditerranée ;  puis il créa successivement les succursales de Marseille, Lyon, Philippeville, Bougie et Bône.

 

     Aujourd’hui, quatre lignes de navigation appartenant à la Maison Le Borgne relient à l’Algérie les principaux ports français de la Méditerranée. Sur l’Atlantique, la succursale de Rouen fut fondée en 1929, puis celle de Boulogne-sur-mer en 1933 avec agences à Dunkerque, Calais et Brest ; deux lignes régulières relient les ports du Nord de la France à ceux de l’Algérie.

 

Ce sont donc six lignes régulières qui, sous le pavillon de la Maison Charles Le Borgne, sillonnent les mers et relient la Métropole à notre belle terre d’Algérie.

 



29/01/2012
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